Mes désirs sont désordre


Mes désirs sont désordre

            


            Lorsque j’ouvris les yeux ce matin-là, je sus que le moment était venu de mettre un terme à cette histoire qui avait beaucoup trop duré. Cela faisait déjà plusieurs semaines que la question me taraudait quotidiennement avant de disparaître au détour d’une pensée. Mais aujourd’hui l’évidence me brûlait les yeux, bien plus que les heures de sommeil qui me manquaient et achevaient de cerner mes yeux. Il me fallait passer à autre chose et clore les années noires en achevant ce chapitre. Pourtant, je ne regrettais rien de ce qui s’était passé entre nous, tous ces moments à ses côtés où son mutisme avait conjugué ma prolixité. Un contrat tacite avait été signé dès notre première rencontre et j’en connaissais complètement les termes. Aussi, à présent que ma décision était prise, aucune amertume ne brûlait mon cœur, considérant notre rencontre comme une étape essentielle pour m’aider à me construire à une époque où je partais à la dérive. Grâce à sa présence rassurante, j’avais enfin trouvé une écoute qui m’avait fait défaut toutes ces années durant pour ouvrir partiellement mon âme et me trouver.

            Alors pourquoi cette séparation aujourd’hui ? J’étais bien incapable de le mettre en mots si ce n’est qu’un déclic avait eu lieu, que cela m’était devenu indispensable. Comment m’y prendre ? Je ne savais pas précisément,  ne connaissant que les grandes lignes. Je voulais lui parler de moi, lui dire que j’avais enfin trouvé les réponses à mes interrogations. Je m’étais leurrée pendant des années en pensant avoir perdu la clé. Cette dernière n’était pas bien loin. Juste là, enfouie en moi. Il fallait tout simplement avoir le courage de chercher pour la trouver et refermer la boite de Pandore. Je m’étais finalement servie de lui pour m’aider à creuser à mains nues ces blessures à vif et suturer cette angoisse. Sa présence ne m’était plus indispensable et je pouvais désormais m’en défaire sans craindre sa réaction car il savait, tout comme moi d’ailleurs, qu’un jour ou l’autre, cette rupture s’imposerait à nous. Pas de cri, ni de larme. Juste une séparation inévitable.

            Aussi, ce matin-là, j’ai su que le moment était venu. Il fallait que je le vois. Cette envie se fit obsédante dès que j‘ouvris les yeux. Coup de fil. Répondeur. Merde ! Je raccrochais et attendais, assise sur mon canapé, les yeux rivés sur l‘affichage digital de mon téléphone portable, laissant s‘égrainer trop lentement les minutes me séparant du prochain appel que je passerai. Nouveau coup de fil. Tonalité. Rendez-vous fixé. Le bout du tunnel était à portée de main. Je n’avais pas cessé d’y penser toute la journée, les idées s’entrechoquant sans cesse. Plus d’une fois j’ai voulu tout arrêter, mais la machine était lancée et je ne pouvais plus la stopper. Une fois arrivée au rendez-vous, il fallait y aller. Surtout, ne pas réfléchir. Agir vite, ne pas le laisser parler. Je n’avais plus le choix. Une grande inspiration... Expiration lente... Pas assurés vers la porte et ouverture énergique. Effet de surprise garanti ! Ne pas faiblir à présent, le plus gros était fait. J’avançais et, comme d’habitude, m’installais confortablement face à lui, dans cet élégant fauteuil noir que j‘affectionnais tant.




            _ Je n’ai plus le temps de jouer au chat et à la souris. Tout doit se terminer ici et aujourd’hui. Ne dis rien. Pour une fois, je ne veux pas t’entendre m‘objecter la moindre chose. Cela fait trop longtemps que ça dure. Trois ans ? Cinq ans ? Non, six ! C’est encore pire. Te souviens-tu comment cette histoire a-t-elle commencé ? A l’époque, je ne vivais pas, mais survivais. Tombée dans un verre d’eau, je ne faisais que m’agiter en surface pour tenter de ne pas couler au fond en ingurgitant à l’infini Prozac et autres substances médicamenteuses matin, midi et soir. Pourquoi ai-je cru à ce moment précis que, bien plus que toutes ces pilules, tu pourrais faire quelque chose pour moi  ? Peut être car tu m’étais apparu comme ma seule planche de salut. Quitte à me perdre, autant tout tenter. La belle affaire ! Murée dans mon mutisme, tu voulais que je te parle de moi. Comment le pouvais-je à l’époque ? Je me haïssais tant que je fuyais les miroirs pour ne pas y voir ce qui me complexait. Ce fardeau était tel que le mettre en mots était chose impossible. Et quand bien même je me mirais parfois, je voyais un visage en tout point différent de celui de mon frère jumeau. Nos différences allaient bien au delà de notre sexe et nos caractéristiques physiques. Nos regards étaient désormais irrémédiablement contraires. Exit la fusion de nos jeunes années, cette gémellité qui nous définissait à l’époque finissait par nous éloigner et dont tu me demandais de te parler. Ma parole a commencé à se délier lorsque est né un début de confiance entre toi et moi, même si je ne t’ai donné que des brides, des voies de garage, des fantasmes.

            Je peux te dire aujourd’hui, en te regardant droit dans les yeux, que j’ai accepté tes silences mais ces derniers n’ont été que trop pesants tout au long de ces années. Nous nous connaissons bien à présent, ou plutôt, tu me connais bien. Mais moi, que sais-je de toi ? Rien. Ce que tu aimes ? Ce que tu détestes ? Ta couleur préférée ? Ta chanson d’amour ? Tout m’est étranger alors que nous avons passé des heures ensemble. Comment être finalement moi avec cet étranger que tu es à mes yeux ? Comment véritablement me confier à toi ? Je n’ai jamais su ce que tu pensais. Rien. Un mur. Nous étions si proches et pourtant nous n’avons jamais franchi cette barrière de l’intime. Tu me dis que ce n’est pas ton rôle. Peut être, mais cela ne me suffit plus aujourd’hui. Alors vois-tu, j’ai décidé de jouer cartes sur table avec toi pour que tout se termine ici et maintenant. Écoute bien mon histoire !

            Bien que tu saches beaucoup de choses sur moi, sais-tu seulement réellement qui je suis ? Cette banale question, nous légitimant en nous donnant une existence entant qu’individu, peut paraître très simple en apparence si l’on se contente de décliner les informations notées sur sa carte d’identité. En effet, notre entrée dans la société se fait par le biais du prénom et du nom que nous portons. Alors moi, Fanchon, aurai-je été la même si j’étais née Lola, Cassandre ou Marie ? Aurai-je fait les même choix si j’avais été Revol-Bourgeois, Guillosson ou bien encore Talbotier ? Nul ne peut répondre avec certitude. Le déterminisme des noms te fait sourire ? Il n’y a qu’à regarder les futurs parents autour de soi pour se rendre compte de l’importance d’un patronyme correctement choisi. “Les Nicolas tout comme les Maximes sont généralement agités.” Pourquoi de tels propos ? A quel moment a lieu la transformation du bébé en un petit être angélique ou démoniaque ? Dans le ventre de sa mère lorsqu’elle choisit le prénom ? Au moment de la naissance ? Lors de la déclaration à la mairie ? Suis-je vraiment moi ou seulement une expression de moi conditionnée par mon héritage patronymique ? Quelle est la part de ma personnalité qui n’est que de mon propre fait ?

            Ce que nous sommes aujourd’hui n’est pas le seul fruit de notre patronyme mais également celui d‘une valeur universelle : le temps. En effet, notre âge nous détermine également socialement. Il est cependant l’élément le plus juste nous mettant tous sur un même pied d’égalité. Que l’on soit smicard ou PDG d’une start-up, ouvrier ou middle class, nous n’avons aucune prise sur le temps qui file et qui nous marque. La peau se détend, les rides apparaissent, les articulations se raidissent. Et là, toutes les dérives sont possibles dans notre société du paraître ! Mais à l’ère de la prothèse et du silicone, des pseudos chirurgiens nous modèlent un corps et un visage stéréotypés répondant à des normes de beauté quasi mondialisées, cherchant ainsi à tromper Dame Nature. Les clones se multiplient, monstres sans expression, aussi lisses et vides les uns que les autres, et à l’apparence dépareillée tel un appartement dont on vient de refaire à neuf une pièce et où toutes les autres nous paraissent ternes et fades.

            Il est facile de décrier le système mais beaucoup moins d’y résister. Quel que soit le support sur lequel nous posons les yeux, des créatures de rêve aux jambes longilignes, seins agressifs, fesses galbées et lèvres pulpeuses posent au côté de superbes éphèbes imberbes et musclés nous rappelant sans cesse les dictats de notre société. Alors je fais comme tout le monde. Je cherche à limiter les ravages du temps en usant de stratagèmes divers et fumeux, et surtout très lucratifs pour certains ! La publicité m’abreuve d’images et m’abrutit en uniformisant mes pensées sur un pseudo modèle universel dans lequel il faudrait se mouler. La résistance est difficile. Mais comment accepter les marques du temps qui affadissent et défigurent les gens lorsque nous sommes portés par le goût de l’esthétiquement beau ? Comment accepter ses transformations lorsque nous recherchons l’élégant ? De plus, ne désire-t-on pas justement lire le désir dans les yeux de l’autre ? Son attirance ne passe-t-elle pas d’abord par le physique ? Quelle belle fumisterie de faire croire que l’être humain cherche avant tout la beauté intérieure ! Toute notre société nous pervertit car ce que nous regardons chez l’autre, c’est avant tout sa plastique. A chacun ensuite de parcourir le chemin le séparant de la vérité intérieure, de définir le rapport qu’il désire construire avec les autres.

            Alors certes nous subissons notre nom et notre âge, mais cela n’est rien par rapport à la problématique sociale sexuée à laquelle nous nous confrontons quotidiennement. « Êtes-vous mariés ? Avez-vous des enfants ? » J’adore ce genre de questions ! Il s’agit généralement de gens qui n’ont rien à dire et qui se réfugie derrière ces interrogations futiles et socialement dictées. Sommes-nous programmés à la naissance pour être hétéro, gay, lesbienne, bi ou choisissons-nous de l’être ? Est-ce notre préférence qui s’exprime ou la société qui nous moule en son sein pour être de bons parents mariés avec deux enfants bien éduqués à la maison ? Sommes-nous alors vraiment libre de notre choix sexuel ? Vouloir reproduire le modèle classique n’est-ce pas plutôt un moyen de se rassurer, de correspondre à une norme, ne pas s’écarter du stéréotype pour ne pas prendre le risque d’être différent ? Éviter ainsi le rejet, les regards inquisiteurs. Comment répondre à toutes ces questions ? La réponse se trouve certainement au fond de nous. A chacun d’accepter ce qu’il y découvre, d’assumer ses choix et de vivre la vie qu’il désire. Vivre la vie d’un autre est peut être ce qu’il y a de plus terrible ! Mais combien de personnes sont déjà passées à côté d’elles-mêmes !

            Arrête de me regarder comme ça ! Tu te demandes bien où je veux en venir ? Je suis tout simplement toi, elle, lui, moi, tous à la fois. Un petit bout d’univers cherchant à savoir d’où je viens. A priori, facile. Je connais mes parents, mes grands-parents. Famille classique et ordinaire me permettant de me positionner culturellement parlant. Rien à dire de particulier. Famille unie et extraordinaire car histoire simplissime sans divorce ni rejet même si je ne me reconnais plus dans les traits de mon jumeau. Mais rien n’est véritablement blanc ou noir. Je viens certes d’un berceau d’amour et de tendresse mais également d’une société normalisée et stéréotypée rejetant ce qui est différent, ce qui n’est pas beau à regarder. Qu’il est facile et pratique de ranger ce qui nous entoure dans de jolies boites décorées et savamment étiquetées : grand - fort - beau... Mais parfois cet effort de classification digne d’un entomologiste s’enraille car certains (les imbéciles !) ne rentrent pas dans une catégorie noble. Que faire ? Revoir la classification qui est peut être absurde ? Certainement pas, tu n’y penses pas ! Comment envisager l’espace d’une seule seconde de remettre en question une si rassurante nomenclature ? Créons plutôt la famille des “trop”, constituée elle-même de sous-familles : les trop gros, les trop moches... Naissent alors le regard en coin, les sourires narquois, les coups de coude dans les côtes pour montrer à l’autre la bête curieuse et difforme qui passe, et parfois même les insultes, les coups.

            Alors, finalement, d’où je viens ? D’un milieu protégé vivant dans un monde faussement respectueux des différences et qui espère se racheter une conscience. Sera-t-il possible un jour de vivre vraiment ce que nous sommes sans en souffrir ? Je le désire mais cela fera un petit peu désordre dans cette société aseptisée dans laquelle j’évolue. Justement, où me mènent mes pas ? Où vais-je ? Qui peut répondre sincèrement à cette question ? Nous avons tous une petite idée de la réponse, certains cherchant à s’accomplir dans leur vie familiale, d’autres dans leur vie professionnelle, et ce afin d’être heureux. Mais qu’est-ce qu’être heureux ? Comment savons-nous que nous le sommes ? Facile me diras-tu, nous avons tous une certaine définition de cet état. Mais cette interprétation nous appartient-elle ou est-elle le fruit du formatage de notre société ? La vie vers laquelle nous aspirons à aller est-elle alors vraiment notre ? Est-ce notre libre arbitre ou la société qui nous guide à faire tel ou tel choix ?

            Qui peut prétendre que ces alternatives qui construiront sa vie sont le seul fruit de ses décisions ? Tout autour de nous conditionne nos actes. En premier lieu, la modélisation par rapport aux parents est omniprésente. Au cours de notre développement, chacun se demande : serai-je à l’image de mes géniteurs ? Vais-je les dépasser ? Si oui, l’accepteront-ils ? Et même si nous avons eu des parents les plus formidables possible, demeure l’angoisse de leur ressembler dans leur manière d’être, d’agir et de penser par crainte de n’être qu’une plus ou moins pâle photocopie conforme. Peut-on échapper à la reproduction d’un modèle familial dans lequel nous avons été élevés ? Certains enfants ayant été battus deviennent à leur tour bourreaux de leurs propres enfants. Si nous nous tournons vers tel métier, tel compagnon de route, n’est-ce pas à cause de ces modèles ancestraux qui constituent le fondement de notre société ? Faut-il alors brûler les contes de fées ? Certainement pas. Il est ensuite de la responsabilité de chaque parent d’ouvrir les yeux de sa progéniture sur le monde qui l’entoure afin qu’elle puisse vivre sa vraie vie et non pas une voie tracée d’avance.

            Mais le plus douloureux en tout cas pour moi, est l’idée d’un prolongement de moi en donnant la vie. Quoi de plus magique et magnifique que d’être mère ? Certes, mais cela signifierait revivre un parcours que je n’ai pas envie de visiter. L’idée de me voir dans un enfant m’effraye : quel trait de ma personnalité portera-t-il en lui ? Quel aspect physique retrouverai-je chez lui ? Suivra-t-il un chemin identique ? Saurai-je lui montrer la voie pour qu’il puisse être lui-même ? Saurai-je l’écouter et le rassurer ? Serai-je là lorsqu’il aura besoin de moi ? Serai-je moi pour qu’il devienne lui ? Quelle garantie avoir ? Je n’en ai aucune aujourd’hui. J’espère juste avoir le courage de lui dire un jour : “Quand tu seras grand, ne te renie pas. Pars à la recherche de qui tu es et vis la vie qui doit être la tienne. Lorsque tu regardes en arrière, n’aie ni remords ni regrets, mais comprends tes erreurs, elles te rendront fort.”

            Ainsi, où je vais, ma foi, je ne le sais pas vraiment. Comme tous, j’ai commencé à me heurter au mur du labyrinthe du Minotaure cherchant à comprendre qui j’étais. J’ai eu à relever de nombreuses épreuves dont je me suis sortie non sans mal et sans bleus. Finalement, ces maux, dont certains subsistent encore aujourd’hui, m’ont paradoxalement aidée à ériger des fondations solides. Il faut accepter cette idée et continuer sa vie en déroulant le fil d’Ariane. Mais attention de ne pas se tromper. Ce fil ne saurait être le même pour tous, dicté par une société mondialiste et uniformisée. Je l’ai cherché en moi afin de découvrir l’essence même de mon être et tenter de mener une existence conforme à ce que je suis. La route est encore longue, le chemin semé d’embûches mais rien ne vaut une vie heureuse.

            Alors, vois-tu, tout comme mon entourage, tu ne connais de moi finalement que ce que j’ai choisi de donner à voir, ne délivrant ma quintessence qu’au filtre de mes envies afin de délivrer une image conforme à celle que je voulais offrir au regard des autres. En agissant ainsi, je me suis éloignée de qui j’étais vraiment, de ce à quoi j’aspirais secrètement lorsque je me surprenais à rêver dans mon lit. J’ai compris alors les chemins sur lesquels tu m’as menée et parfois égarée au fil de nos conversations. Je ne veux plus de ce fard pour masquer mon âme. J’ai enfin compris l’indispensable futilité de cette quête identitaire. Mais j’ai surtout intégré l’idée que bien plus que ces considérations sociales, ce sont mes actes qui font de moi ce que je suis. Ne sont-ils pas plus loquaces et authentiques que mes mots maquillés ? Alors mon identité, je laisse l’Autre la découvrir à la lumière de mes agissements, de mes envies, sans avoir à rendre compte de ce que je suis.
             
            Voilà, tu sais tout à présent. Pour la première fois enfin, j’ai pu donner à voir ce monde intérieur bouillonnant, faisant fi de ce que l’Autre, et en l’occurrence toi, aurait pu penser de moi. Sache aussi que je n’ai plus peur de ces questions qui ont cessé de me tourmenter. Pour la première fois, je semble ouvrir les yeux sur cette longue route qui s’ouvre à moi et sur laquelle j’ai encore tant de chaussures à user. Je sais les virages serrés, en épingle parfois, et les dérapages contrôlés qui m’attendent, mais j’ai le cœur si léger et gonflé d’espoir. Je peux donc te quitter car je n’ai plus besoin de toi. Tu m’as été utile pendant toutes ces années mais ce n’est plus le cas aujourd’hui. Je sais que tu comprendras car tu as déjà vécu de nombreuses fois cette situation qui est la suite logique des choses. Alors, merci.”
             


            Sans même lui jeter un dernier regard et lui laisser le temps de m’adresser le moindre mot, je me lève d’un bond, saisissant au passage ma veste sur le dossier du fauteuil et mon sac posé à mes pieds, et quitte prestement la pièce. Sourire. Je m’avance d’un pas décidé vers le bureau de sa secrétaire pour y déposer le chèque de la séance et claque la porte du cabinet du Docteur Egna, psychiatre de son état et nouvelle étoile de la télé réalité.  Éclat de rire. 















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